POURQUOI CE BLOG ?

Ce blog est destiné à donner un avis sur des films récents. Cela permet de partager une passion commune que l'on n'a parfois pas le temps de faire à cause de nos emplois du temps (sur)chargés.

La crise sanitaire ayant eu raison des cinémas et des programmations, des films un peu antérieurs à 2020 peuvent être évoqués dans l'actualité.

Bonne visite
Wilfrid RENAUD

samedi 4 novembre 2023

KILLERS OF THE FLOWERS MOON

 Article de Wilfrid RENAUD

Il y a des films de plus de trois heures dont le montage est tellement mal géré en terme de narration qu’ils en deviennent vite ennuyeux pour le spectateur. Ce fut le cas pour ma part avec « Oppenheimer »  trop bavard et trop lent malgré un sujet en or, tant et si mal qu’il ne figura pas sur ce blog, contrairement à d’autres films controversés de Christopher Nolan.

Le dernier Scorsese n’est pas de cette trempe, il y a des longueurs certes,  mais qui ne desservent quasiment pas le film. Sur un fait divers aux allures de scandale raciste et sociologique, il choisit de raconter de l’intérieur pour mieux nous faire ressentir le malaise, dénonçant toute une tranche de la population de Fairfax en Oklahoma, obnubilée par l’argent et la possession de territoires au point de commettre des meurtres, les uns couvrant les autres avec une noirceur psychologique qui fait froid dans le dos.

Au début du XXème siècle, les indiens Osage, dont le comté porte leur nom, se sont enrichis grâce au pétrole issu de leurs terres. Placées sous tutelle financière par l’Etat, les familles voient leurs coutumes et leurs descendances se perdre dans les mariages avec des Blancs.  Ceux-ci en épousant des femmes Osage deviennent les héritiers légitimes de leurs concessions. Ernest Bukhart (Léonardo DiCaprio), revenu de la première guerre mondiale, se voit attribué par son oncle le très influent William Hale( Robert De Niro) la mission de séduire Molly (Lily Gladstone), une riche propriétaire. Tandis que les meurtres et morts mystérieuses d’Indiens Osage se multiplient, Ernest devient le chauffeur attitré de Molly.

 

Le film est une autopsie d’un génocide programmé des indiens Osage, poisons, assassinats aux pistolets par personnes interposées. L’organisation calculatrice des Blancs est à vomir, ceux-ci devenant les faux-domestiques des riches Indiens pour mieux  les duper.  Le personnage de DiCaprio, partagé entre l’appât du gain, la peur de son oncle et son amour pour Molly est sans doute le plus complexe que l’on ait vu depuis longtemps. Basé sur des événements et des personnages réels, le spectateur  reste halluciné du peu de valeur qu’accordait les américains aux vies humaines des amérindiens à cette époque.  En même temps entre l’esclavagisme noir et l’extermination des tribus indiennes à peine 60 ans auparavant, comment peut-on être étonné de la froideur et de l’avidité générale ? Justement parce qu’elle était générale. Au sein de Fairfax, pas un Blanc n’était au courant et devenait plus ou moins complice des meurtres perpétués.

Scorsese retranscrit très bien cette décadence morale liée à l’argent, les territoires et ce besoin de posséder plus. Mais il a eu aussi l’idée maline de nous immerger dans la culture Osage, à travers des scènes parfois proches de leurs folklores, qui n’apportent rien à l’évolution de la narration mais permet d’apprécier un peuple démuni et bafoué qui obtiendra justice grâce à l’intervention -tardive- du FBI, organisme naissant sous la direction de J. Edgar Hoover.

 

 

Au centre de ce scandale écœurant, un trio d’acteurs se dégage du lot. DiCaprio et De Niro bien sûr, fidèles du cinéaste, avec respectivement cinq et neuf films tournés avec Sorcsese. Leurs rapports, fondés à la fois sur la peur et le respect des générations,  donnent lieu parfois à des scènes de dominant et de dominé, accentuant le coté maladif de cette société, bourrée d’hypocrisie en présentant un visage compatissant à l’opinion publique, la loi et la religion. Et il y a Lily Gladstone, lumineuse, dont le personnage, Molly, portant la force tranquille de tout un peuple, ne sera pas dupe de l’avidité des Blancs mais finira par se laisser séduire par l’amour d’Ernest qui lui semblait différent. Un amour vérolé, perverti, toujours sur le fil du rasoir entre le mensonge et la passion que le scandale et la vérité finira d’achever.

Scorsese fait aussi preuve d’une inventivité et d’une audace désarmante dans son épilogue, racontant sous une forme d’émission radiophonique, le destin final de ses divers protagonistes, à grand renfort de bruitages ingénieux et typiques, donnant un coté vintage à sa conclusion qui devient le contre-pied d’une industrie cinématographique, dominée par les effets spéciaux, les fonds verts et la motion-capture.

Sans doute pas son meilleur film loin de là, mais dans le panorama actuel, sa dénonciation d’une Amérique au passé pas très glorieux, pervertie et avide, se conjugue merveilleusement avec la solidarité envers les opprimés et son amour du cinéma.




LE DERNIER VOYAGE DU DEMETER

Article de Frédéric SERBOURCE



 La salle se retrouve plongée soudainement plongée dans l'obscurité. À l'écran, les quelques encarts contextuels et un flashforward rappelant le destin funeste du Demeter nous contaminent également de leur noirceur, posant d'emblée une ambiance pesante véhiculée par la simple aura de la créature séculaire qu'ils convoquent. Dracula.


Les quelques pages du chapitre "Journal de Bord du Demeter de Varna à Whitby" issues du célèbre roman de Bram Stoker connaissent en effet aujourd'hui une nouvelle adaptation, après ce qui est probablement le meilleur (le deuxième) des trois épisodes de la série "Dracula" de Netflix. Cette fois, ce passage épistolaire se retrouve développé sous le format d'un long-métrage de près de deux heures, mis en scène par le norvégien André Øvredal qui, certes, n'a jamais rien fait de mieux que son premier film "Troll Hunter" mais qui, en vrai artisan attaché au genre, réapparaît à la tête de projets fantastique/horreur toujours intrigants et valant le coup d'oeil ("The Autopsy of Jane Doe", Scary Stories" ou "Mortal"). Le voir se frotter à un tel mythe, dont le nom traverse les décennies et les médias pour être encore connu de tous en 2023, ne peut que donner envie découvrir sa propre itération autour de cette figure sanguinaire traversant ici les flots à bord du Demeter, de sa Transylvanie natale aux côtes anglaises...

Outre les ténèbres que l'évocation du vampire distille dans son sillage, le film nous emporte avec brio et simplicité dans l'agitation quotidienne d'un port bulgare à la fin du XIXème siècle, s'ancrant dans une forme de véracité historique -et donc rationnelle- pour nous introduire aux membres de l'équipage qui seront bientôt face à l'innommable. Ne perdant pas de temps et faisant preuve d'un vrai savoir-faire pour dessiner un éventail de protagonistes aux vicissitudes efficacement exprimées (le docteur, le capitaine et son second en sont le trio directeur réussi, très bien campés respectivement par Corey Hawkins Liam Cunningham et David Dastmalchian), le film nous enferme assez vite dans le huis-clos de son vaisseau isolé en haute mer, imprégné par une atmosphère toujours plus dominée par la présence irrésistible de sa menace dissimulée dans les cales.

Évidemment, le sort du Demeter et de ses passagers étant pratiquement joué d'avance, le film d'André Øvredal va quelque part faire tout ce que l'on peut attendre de lui, c'est-à-dire faire monter en puissance les attaques de son Dracula à chaque nouvelle nuit de la traversée. Mais "Le Dernier Voyage du Demeter" va surtout le faire bien, s'inspirant d'une plus belles références en matière de longs-métrages angoissants en vase-clos : "Alien" premier du nom.
Avec son Demeter/Nostromo des temps anciens et son équipage de marins/victimes devant s'adapter à une forme de vie tout autant inconnue que carnassière, la reprise du schéma de cette référence incontournable prend ici tout son sens, les effluves de son climat perpétuellement anxiogène vont en plus bénéficier des connaissances complices du spectateur sur la bête à affronter en vue de malmener au maximum les nerfs de ses potentielles victimes. Et, à ce petit jeu, on peut dire qu'André Øvredal mène sacrément bien sa barque durant la majeure partie de la traversée, ne dévoilant que progressivement la silhouette de son prédateur (en mode incarnation bestiale) sur un terrain de chasse désormais fondu dans les recoins les plus sombres du Demeter d'où il peut à n'importe quel moment de la nuit surgir pour croquer une ou deux jugulaires. La tension exponentielle ressenti par les passagers déteint pleinement au-delà de l'écran, d'autant plus qu'Øvredal utilise de façon judicieuse quelques éléments du lore du vampire avec l'objectif de renouveler la nature de ses attaques et en maximiser certains effets de surprise plutôt bien pensés dans ce contexte.
En plus de personnages principaux révélant des facettes humaines touchantes dans l'épreuve où, bien entendu, vont se mêler parfois leurs points de vues divergents sur la manière de régler la situation (foi contre science, fuir ou faire face, etc) et des comportements extrêmes, il faut enfin signaler que le film n'hésite pas à mettre véritablement tous les passagers du Demeter au même niveau face au danger qui rôde, n'hésitant pas aller bien plus loin en ce sens que la plupart d'autres productions du même type pour réduire les humains au seul rang de proies devant leur prédateur.

Malgré toute l'efficacité brute de cette démarche se résumant à un jeu du chat et de la souris teinté de relents gothiques (jusqu'à la forme débouchant sur de superbes plans d'horreur maritime), il faut bien reconnaître que les pics d'adrénaline provoqués par ce "Dernier Voyage du Demeter" s'étiole dans son dernier tiers, sans doute devant la trop longue durée du film.
Parfois trop redondante au sein de ses phases diurnes (vous ne pouvez pas fouiller ce bateau de fond en comble en une fois, punaise ?!) et ne trouvant plus le même équilibre salvateur entre les passages à l'action et le temps des échanges, la dernière partie délivrera néanmoins encore de bons moments quant au sort intime réservé à certains protagonistes ou durant les ultimes attaques plus spectaculaires de la bête mais la tension qui avait tenu la barre du film d'une main décharnée jusque-là n'aura définitivement plus la même force, ne s'exprimant plus que par quelques soubresauts qualitatifs dans lesquels il manquera le feu d'artifice final auquel le film aurait pu prétendre... Même si l'épilogue, bien pensé, donnera malgré tout envie d'y revenir pour continuer à côtoyer ce Dracula n'ayant peut-être pas encore révélé toutes ses facettes.

Les lumières se rallument en même temps que le très bon score de Bear McCreary résonne une dernière fois à nos oreilles. Le "Dernier voyage du Demeter" s'est achevé mais la légende de Dracula, elle, continue bel et bien de se perpétuer grâce à lui

samedi 25 mars 2023

DON'T LOOK UP -DENI COSMIQUE







 Article de Wilfrid RENAUD

Il était une fois… une astronome anonyme, travaillant dans un petit centre de recherche qui découvre par hasard une météorite de plus de dix kilomètres de large, devant atteindre la Terre dans six mois…et anéantir toute vie.

 

On le sait depuis le Covid-19, la gestion mondiale en cas de crise, ce n’est pas ça. Avec un postulat de départ somme tout basique, Adam Mc Kay le scénariste-réalisateur, livre une fin du monde bourrée d’ironie, en fracassant les vitrines de la société américaine, tant au niveau politique que médiatique et sociétal, combinant ces trois vecteurs de manière jouissive.

 

Ce miroir tendu sur notre époque n’est pas reluisant, il livre même une synthèse acide et sans compromis. Et si on rit (beaucoup), l’inéluctabilité du dénouement apocalyptique qui s’annonce à grands pas s’avère être lui terriblement effrayant. Pas tellement à cause de la fatalité de la catastrophe mais plutôt à cause de notre incapacité à l’enrayer, si le cas se posait, les autorités décisionnaires du plus grand pays du monde (les USA) faisant la girouette entre la bêtise et l’appât du gain.

Dans le rôle des astronomes, dépassés par les événements, lanceurs d’alerte et pourtant parfaitement lucides sur ce qui convient de faire et ne pas faire, Léonardo Di Caprio et Jennifer Laurence sont redoutables. Rien que la scène d’ouverture où le personnage de DiCaprio, Randal Mindy, effectue deux fois ses calculs avant de ce rendre compte à travers ses équations que l’impossible est en train de se produire, vaut son pesant d’or; l’acteur passant de la décontraction joviale à la terreur contenue en un clin d’œil démontre, s’il est encore besoin de le prouver, qu’il reste l’un des plus doués de sa génération.

 

La suite du casting est royale, chacun semblant savoir d’avance le rôle et le jeu le plus adéquat en fonction de la situation. Meryl Streep, en cousine germaine d’Hilary Clinton avec des gênes trumpiennes, place elle aussi la barre haut avec son interprétation de présidente des États-Unis et Mark Rylance est doublement épatant en parodie d’Elon Musk. Sans oublier Cate Blanchett et Jonah Hill, dont le mépris respectif de leur rôle les rendent aussi détestables qu’hilarants.

Mais le film de McKay ne sert pas à un défilé de stars, on y voit cette volonté de concrétiser un scénario malin et solide, bien qu'il semble un peu long dans son dernier tiers mais qui nous laisse réfléchir sur la vacuité de nos existences face à un exterminateur venu du fond de la galaxie.

Le coté show des médias qui minimisent l’annonce, leur opportunisme pour gonfler l’audimat quand ils découvrent que le danger est réel et celui du gouvernement de continuer à faire des bénéfices, au détriment de la sécurité mondiale, en disent long à propos du manque de maitrise et de la visibilité sur le long terme, des cercles médiatiques et politiques, les désignant comme les responsables directs de la fin de notre civilisation.

Le sentiment de gâchis demeure lors de l’épilogue où les principaux protagonistes se retrouvent à table pour un dernier repas, faisant face courageusement à leur destin. La scène d’une justesse implacable dans la gestion des sentiments de tout à chacun, laisse un goût amer avec la phrase finale prononcée par Randal (DiCaprio) : « On avait vraiment tout ».

 Et si cela reste de la SF, on ne peut s’empêcher de penser, malgré les bonnes volontés, que la nature reprendra naturellement ses droits sur l’humanité, d’une manière ou d’une autre, l’intelligence des uns face à la bêtise des autres ne pesant pas lourd dans la balance.

dimanche 29 janvier 2023

LA METHODE WILLIAMS


 

 

 

 

 

 

Article de Wilfrid RENAUD

 La claque de Will Smith à l'encontre de Chris Rock à la cérémonie des Oscars de l'an dernier, suite à une blague déplacée sur sa femme, a éclipsé une bonne partie des qualités de ce biopic sur l’ascension des sœurs Williams, Serena et Vénus.

 

 La première restera longtemps dans l’ombre de sa sœur avant d’être considérée comme la meilleure joueuse du monde. Jeunes prodiges du tennis, leur père Richard, sous des dehors exigeants, fera tout pour les sortir du ghetto, leur éviter les gangs et la drogue, en leur insufflant la compétition, le goût du travail et préservant leur enfance, sans céder aux sirènes de l’argent facile, via des entraineurs et des sponsors peu scrupuleux. A ce titre la séquence où la police débarque chez lui, suite à des « maltraitances » sur ses enfants, est ce qu’il y a de plus parlant face à l’éducation que Richard Williams et sa femme donnent à leur descendance. Et le laïus que délivre l’acteur à l’assistance sociale est l’un des plus lucide que j’ai pu entendre sans sombrer dans la complaisance.

Campé par un Will Smith qui n’a pas volé son Oscar, l’homme est parfois pétri de contradictions, essayant d’inculquer l’humilité à ses filles, mais s’interposant dans l’entrainement des coachs et se vantant assez lourdement du talent de Vénus lors des premiers matchs dans les tournois.


Le reste du casting est de qualité, les deux actrices incarnant respectivement Vénus et Serena (Saniyya Sidney et Demi Singleton) incarnent les futures championnes avec à la fois la fraicheur de l’adolescence et la maturité de futures grandes actrices. Aunjanue Ellis dans le rôle de la mère, Brandi Williams, tient tête à Will Smith dans des scènes de couple parfois tendues où leurs désaccords s’étalent dans toute leur complexité.

Enfin, dans les rôles des différents entraineurs croisés le long des carrières des  sœurs Williams, si le comédien Tony Goldwyn assure dans celui qui acceptera de les entrainer pour la première fois de manière professionnelle, c’est Jon Berthal qui emporte le morceau dans le rôle de l'entraineur Rick Macci. Essayant d’appliquer sa méthode qui va à l’encontre de celle du patriarche, il donnera, tout en gardant sa dignité et son professionnalisme, constamment l’impression d’être le dindon de la farce.

Les matchs quand à eux, sont filmés élégamment mais sans esbroufe, le sujet étant plus sur l’analyse de l’ascension des deux championnes, orchestrée par leur père,  que sur l’exploit même. La fin du film est d’ailleurs représentative, se terminant sur une défaite de Vénus Williams, gardant cette humilité propre à l’adolescente, mais gagnant le cœur de milliers de jeunes afro-américaines, devenant un modèle pour toute une génération.






lundi 9 janvier 2023

AVATAR : LA VOIE DE L'EAU

Article de Wilfrid RENAUD

13 ans après le premier opus, James Cameron nous livre ce deuxième volet très attendu.  Je l’avoue si l’effet de surprise n’est plus au rendez-vous, je ne peux m’empêcher de défendre ce film pour les valeurs humaines qu’il véhicule, et on peut sûrement y trouver une centaine de défauts mais coté spectacle ça reste largement au dessus des films de super-héros produits à la chaîne et autres blockbusters bas de plafond. Si vous ne l’avez pas encore vu le film, arrêtez-vous là, car certains éléments non dévoilés dans la bande-annonce méritent un petit développement.

 

D’abord le sujet est touffu, carrément fourre-tout, jouant autant la carte de l’écologie, que la dénonciation capitaliste et les valeurs morales de la famille tout en restant dans le cadre de la science-fiction qui permet sur certains points d’aller « plus loin ». Sur le fond ce qui m’a surpris, c’est que les « enfants » de Jake Sully et Ney’tiri (respectivement Sam Worthington et Zoé Saldana) prennent rapidement le relais de leurs parents,  avec pour certains des rôles déterminants dans le récit. Guillemets autour des enfants, car l’ainée des filles, Kiri, n’est autre que la fille biologique de l’avatar de Grace Augustine, le personnage joué par Sigourney Weaver.

Le futur proposé par James Cameron permet donc de jouer aux apprentis sorciers de manière encore plus surréaliste en mélangeant le clonage, les embryons et les naissances in vitro. Si on regarde de plus près, la petite Kiri est une aberration. 

Un être vivant issu d’une coquille vide.

Ce qui est parfaitement rendu dans son cheminement personnel, se cherchant constamment une place entre plusieurs mondes. Celui de sa famille adoptive, celui des humains, celui des Na’vis et enfin le monde animal avec lequel elle a une connexion étrange qui s’épanouira dans le dernier quart du film en lui conférant des capacités miraculeuses, la désignant comme une élue évidente pour les futures suites. Ayant peu suivi les secrets de tournage avant d’aller voir le film afin de rester totalement neutre à sa vision, je me demandais qui était cette gamine remarquable qui jouait comme une adulte…et je fus agréablement surpris de découvrir que Sigourney Weaver avait rempilé pour jouer en motion-capture, le rôle de l’adolescente. Outre le capital sympathie de l’actrice, c’est pour moi sans conteste le meilleur personnage du film.


 James Cameron n’a jamais été reconnu pour la subtilité de ses personnages, ni de son cinéma , son approche très rentre-dedans n’a pas la complexité d’un Nolan ou d’un Fincher, on le sait et on sait à quoi s’attendre quand on va voir un de ses films. Je trouve qu’il est dommage qu’on lui reproche encore ça après toutes ces années, car il offre en revanche avec générosité un spectacle dont peu de cinéastes peuvent aujourd'hui se vanter. Et cette fois, il le fait par le biais d’un autre personnage Lo’ak (Britain Dalton, acteur américain de 21 ans inconnu du grand public), qui hérite du rôle ingrat du second fils, celui qui recherche l’approbation de son père. Né avec cinq doigts au lieu des quatre de la race Na’vi, l’acceptation de sa différence auprès des enfants des autres tribus passera par tous les stades, allant du rejet à la moquerie et par conséquence la confrontation. Pour prouver sa valeur, il bravera les interdits et les dangers avec une escapade océanique qui donnera lieu à un lot de séquences époustouflantes dont l’effet contemplatif devient quasi-hypnotique. Le réalisateur offre vers le milieu du récit des images quasi-documentaires d’un monde virtuel qui atteint un état de grâce inattendu.

 

 

Car « la Voie de L’eau » amène avec son nouveau lieu géographique, loin des forêts du premier opus, de nouvelles tribus, coutumes et créatures, accompagnées d’un mysticisme un peu désuet mais s’ajustant bien à la féérie sous-marine. On y sent avec une constance désarmante l’amour que porte sincèrement James Cameron aux océans et la faune  aquatique de notre vieille planète Terre. La métaphore est tellement mince que seuls les grincheux et les cyniques se gausseront devant le coté fable du récit qui dénonce pourtant l’extraordinaire capacité qu’à l’homme « moderne » à reproduire sans cesse les mêmes erreurs pour le profit, au détriment du respect des civilisations et de la nature. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Si la colonisation était la thématique de cette dénonciation 13 ans auparavant, la chasse à la baleine est ici pointée du doigt à travers les Turkun, géants des mers en communion totale avec les habitants de la planète Pandora, dont un des bannis sera un atout précieux dans la bataille finale. Ces créatures possèdent un élément-clé dans leur organisme qui permet d’acquérir une forme d’immortalité, exploitée lors de ses fameux clonages embryonnaires où les souvenirs sont implantés.

 

 

 

 

 

 

Car les Terriens capitalistes, après avoir vidé de toutes substances leur planète d’origine sont de retour bien décidés à piller les richesses de Pandora. Pour le meilleur et pour le pire. Les caricatures sont autant présentes que les nuances sont absentes de ce coté. Et ce n’est pas l’arrivée de ce nouveau commando qui va traquer Jake Sully et sa famille durant deux bonnes heures qui me fera mentir. Tous ont la psychologie d’une huitre armée d’une mitrailleuse. 

Seul personnage à tirer lui son épingle du jeu, l’avatar du clone de…Quaritch,(toujours joué par Stephen Lang) colonel teigneux décédé dans le premier opus, tué par Ney’tiri de deux flèches dans le corps, comme il le découvrira à ses dépends, ayant tous les souvenirs de son géniteur, sauf ceux de son décès, les implants ayant été fait ultérieurement... De la science-fiction, certes, mais cette opportunité de revenir « d’entre les morts », donne à ce nouveau personnage, une humilité et une prudence qui le rendent moins manichéen que dans le premier opus. D’autant qu’il va découvrir qu’un jeune humain abandonné fréquente les enfants de Sully et qu’il n’est autre que…le fils de Quaritch. Donc, un peu le sien par conséquence.

 

 

 

Cette révélation va donner lieu à la plus étrange relation père-fils que l’on ait vu entre un humain et un être créé biologiquement, où la haine et l’amour se disputent dans le cœur du garçon, surnommé Spider ( ?? pourquoi d’ailleurs) Lui aussi est à cheval entre la caricature et la complexité. Espèce de Mogwli bondissant, happé par le mode de vie Nav’i, il reste constamment avec un respirateur à cause de l’air nocif de Pandora, cherchant une place qui ne lui est pas accordée, mais aussi un père auprès de Jake tout en refusant la main tendue du clone, restant tiraillé par des sentiments contradictoires envers l’avatar de son géniteur.

De même, le double bleuté de Quaritch, malgré le faux désintéressement pour le garçon dont il affirme n’être pas « le père véritable », ne cherche au fond qu’à retrouver à travers lui cette part d’humain qui lui fait désormais défaut.

La paternité, ici sous ses diverses formes et nuances, est l’un des aspects les plus intéressants du scénario, parcourant des territoires inédits, presque tabous, qui déboucheront pour les trois enfants cités (Kiri, Lo’AK et Spider)  sur la découverte de leur identité.

 

Les deux autres, eux, n’auront pas cette chance, sacrifiés à la caricature pour l’une, pleurnicharde  au possible, et sacrifié tout court pour l’autre, à la structure dramatique du récit où la haine et la vengeance reprendront le dessus dans un combat teigneux et crépusculaire, lors d’une éclipse et le dernier quart du film.

Lors de cette séquence, sans doute un poil trop longue, le réalisateur semble se faire un propre clin d’œil avec des références à Titanic et Abyss, et ce bateau chasseur de Turkuns, prenant l’eau et se mettant à couler avec une partie de ses protagonistes, bouclant la boucle d’une carrière placée sous le signe du spectaculaire et de l’innovation, avec une démesure assez unique en son genre.

 

Rendez-vous pris avec ses deux (trois ?) suites, tant l’immersion est plaisante malgré des défauts récurrents.

 Sans 3D pour moi. Outre cette baisse de la luminosité à cause des verres des lunettes, celle-ci m’ennuie profondément dans cette manière aléatoire de vouloir nous faire croire à l’émerveillement des scènes, avec un poisson ou une algue anecdotique qui passe sous nos yeux,  alors qu’elle devrait être un outil d’appui pour la narration de certaines séquences au même titre que la musique et le montage du film.

Si je veux voir de vrais films en 3D, je vais au Futuroscope pas au cinéma…






 

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