Article rétroactif de mai 2022 de Frédéric Serbource
Là, c'est rare, mais les mots me manqueraient presque... J'en arrive même à me dire que je pourrais arrêter mon année cinéma là-dessus tant on est à un stade où beaucoup de choses ne peuvent paraître qu'insipides après un film pareil.
Ayant adoré "Swiss Army Man" de ces mêmes Dan Kwan & Daniel Scheinert, c'était un long-métrage que j'attendais tout particulièrement, avec la peur évidemment que la hype suscitée autour de lui outre-Atlantique ne soit pas complètement à la hauteur de mes espérances... Eh bien, non seulement "Everything Everywhere All At Once" l'a été mais il en a atomisé le seuil pour aller au-delà dans des proportions que je n'aurais jamais pu soupçonner.
Le plus grand tour de force du film est finalement de débuter par quelque chose d'extrêmement simple en apparence, l'état de surmenage de son héroïne dont le quotidien chaotique nous est décrit en quelques minutes, pour nous entraîner dans la plus folle des expériences de Multivers jamais décrite au cinéma (autant dire que le Docteur Strange est KO au premier round, sorti sur civière et enroulé dans sa cape). D'un point de vue visuel, j'ai l'impression d'avoir vu tout ce qu'un arc-en-ciel cinématographique est capable de produire de mieux, de plus inventif et de plus barré pour retranscrire cet enchevêtrement infini de mondes géniaux dans lequel Michelle Yeoh se retrouve propulsée en tant que superhéroïne malgré elle et dont le fonctionnement ne cesse de révéler toutes ses subtilités pour notre plus grand plaisir. Je meurs déjà d'envie de le revoir par la profusion de plans et de scènes dingues que ma mémoire prend un malin plaisir à raviver dans le désordre, les nombreux éclats de rire devant l'absurdité de moments amenés à devenir cultes à mes yeux (je ne me remettrai jamais de la "danse des doigts" ou de Raccaccounie) ou encore les superbes instants d'émotion que le film construit sur la durée et qu'il base sur le relationnel en perpétuelle évolution de ses excellents personnages amenés à se (re)découvrir réellement.
"Everything Everywhere All At Once" part en effet peut-être d'un postulat simple autour du rôle de son incroyable actrice principale mais, grâce aux tunnels de regrets et d'erreurs passés (et de n'importe quoi hilarant aussi) représentés par le Multivers qui l'emporte, il exalte de ce personnage toute la complexité de ses sentiments et non-dits refoulés, issus de tant d'années de frustration, pour enfin peut-être lui ouvrir les yeux et la guérir au sein de la plus déjantée des odyssées intérieures/interdimensionnelles qu'il m'ait été donné de voir..
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