Hollywood, on le sait, aime les handicapés avec ce trait de génie qui fait voir la vie autrement au commun des mortels. Les oscarisés, Tom Hanks et Dustin Hoffman sont là pour le confirmer.
En adaptant le livre de Jane Hawking, le réalisateur James Marsh part avec un avantage de poids, contrairement aux personnages fictifs de Forrest Gump et Rain Man auxquels je faisais référence : tout le monde, ou presque, connaît Stephen Hawking, théoricien de génie, cloué dans son fauteuil par la maladie de Charcot.
Stephen Hawking |
Le capital "sympathie" pour ce personnage exceptionnel qui a fêté ses 72 ans est évidemment énorme dès le départ dans le regard du spectateur.
Pourtant le film aurait pu se planter, en forçant le trait ou jouant la carte des violons. Mais non.
L'émotion vient d'elle-même, en grande partie grâce à l'acteur, oscarisé ce mois-ci, Eddie Redmayne. Si son précédent rôle dans Jupiter Ascending m'avait laissé de marbre, ici il y est lumineux. Un regard plein de malice et un sourire enchanteur, il en faut parfois peu pour faire une bonne prestation.
E. Redmayne interprétant S. Hawking |
On découvre Stephen Hawking en 1963 alors qu'il est encore étudiant en cosmologie à l'université de Cambridge et que la maladie ne l'a pas encore atteint, malgré des signes avant-coureurs. Une tasse qui tombe, un pied qui trébuche mais Stephen ne s'en soucie guère, il a 21 ans et toute la vie devant lui. L'acteur incarne un jeune homme gauche, candide mais brillant qui en fait tout de suite une personne très attachante.
Sa rencontre avec Jane, étudiante en lettres, va changer sa vie à tout jamais. Saluons aussi le jeu et la palette d'émotion de Félicity Jones, éclipsés par son compagnon même si son rôle reste primordial tout au long du film.
David Thewlis dans le rôle du professeur Sicama, qui deviendra l'ami proche d'Hawking au fil des années, complète ce casting sans faute.
La mise en scène est élégante et fluide. D'une grande force par sa simplicité comme si Hawking avait mis lui même toute sa personnalité dans la réalisation. Le discours scientifique est compréhensible car on y parle, tout de même un peu, de la création de l'univers, du Big Bang et de trous noirs, avant d'assister à la progression terrible de la maladie de Charcot, dont les médecins donnaient seulement deux ans de vie à Hawking.
L'homme, d'abord réticent à s'engager avec Jane, la partie de criquet pleine de colère contenue en dit long, se laissera convaincre par sa future femme et gardera une foi, un courage et un humour incroyables durant les trente années de vie commune au cours desquelles ils auront trois enfants.
L'une des plus belles scènes du film est sans doute celle de leur séparation.
A travers sa voix artificielle Stephen lui annonce qu'il partira recevoir un prix avec Elaine, son infirmière qui deviendra sa future femme. Après s'être usée durant des décennies à ses côtés, Stephen sait que les mots qu'il a tapés sur son écran, marqueront la fin de l'engagement sacrificiel de Jane auprès de lui.
Il la laissera donc partir vers un autre bonheur et un autre amour en la personne du professeur de musique de la famille.
Un fauteuil qui s'avance vers elle quand elle se détourne, car c'est le seul geste qu'il peut faire, la déclaration simple de Jane "Tu as été un grand amour" et le visage triste de l'acteur font de cette scène une petite perle d'émotion, aucunement calculée, qui conclue leur merveilleuse histoire.
Le film respire la vie, le courage et l'amour, à travers un personnage hors du commun qui a révolutionné la cosmologie et aura sûrement marqué chaque personne qu'il aura rencontré.
Lors d'une conférence, il conclue par une phrase maintes fois entendue "là ou il y a de la vie, il y a de l'espoir" mais ici, elle prend une dimension vertigineuse en la personne de Stephen Hawking.